Furmint, à l’est dans ses baskets.
Il y a longtemps eu en France une confusion entre Furmint, Tokay et Pinot gris d’Alsace. Il se dit qu’un général français, revenu de Hongrie au XVIe en aurait rapporté quelques pieds dans ses bagages à main. Il se trouve que le Furmint n’est arrivé en France qu’au XIXe.
Qu’a-t-il fait pendant ces trois siècles ?
Visiter les châteaux de la Loire, arpenter la promenade des Anglais ? Peu importe, ce cépage blanc a un atout majeur pour un raisin de cuve : des niveaux de sucre et d’acidité élevés, une complexité aromatique.
Ces deux qualités font de ces vins de garde vifs et enrobant des valeurs sures pour y placer sa confiance et y tendre son verre.
Continental, moi ?
N’est pas slave qui veut. Tout le monde n’a pas l’âme aussi bien trempée que Furmint. Ce cépage blanc de cuve a des grappes compactes, des gros-grains à la peau épaisse. Il est paré pour résister aux invasions et aux climats continentaux : très froid l’hiver, très chaud l’été ! Il nous réserve des jus sucrés et épicés bien à lui !
« Eins für dich und eins furmint ! »
Ce nom aux origines troubles a l’avantage d’être prononçable en plusieurs langues. Furmint en France, Furmint en Italie, Slovanie, Furmint (de Minis) en Roumanie et jusqu’à Chypre. Furmint en Hongrie, dans son chef-lieu ; même si là-bas, on le baptise parfois Kéknyelü.
Bizarrementelü, ce nom n’a pas passé les frontières !
Il peut répondre en Croatie au curieux nom de Sipon.
Allez, vous verrez peut-être un jour avec Tokay, Moslavac ou Mosler levé le mystère de ses origines… Mais tout ça reste officieux.
Un vin exceptionnel, cela cent ans.
Le Furmint donne des vins dorés secs, demi-secs et moelleux, au caractère corsé et concentré.
Ses jus fermentés sont équilibrés grâce à un alcool élevé, une belle acidité, un corps charpenté et un florilège d’arômes.
Notes de pomme, poire, agrumes, fumée, végétal, fougère pour les blancs secs.
Sans compter les notes d’écorce d’agrumes, d’abricot, de fruits secs, confits, de sucre d’orge, miel, note épicée, de thé, de tabac, de chocolat pour les vins moelleux. Ces derniers avec leur texture sirupeuse donnent au Tokay (Hongrie) son berceau d’origine, les vins doux de Tokay sont parmi les plus chers du monde.
Et pour cause un potentiel de garde hors norme : jusqu’à 100 ans pour les meilleurs !
À l’est l’Eden.
Il se déploie avec panache dans tous les pays est-européens : en Slovaquie, Croatie, Roumanie, Slovénie, en Autriche (où l’on en fait des vins de dessert), en Bulgarie.
On peut aussi le croiser en France notamment dans les régions chaudes de l’Hérault, l’Aude ou le Gard.
Mais soyons francs – sans être cabernet – c’est bien dans la région de Tokay en Hongrie qu’il donne le meilleur de lui-même. Seul ou en bande organisée : Sàrga muskotàly (muscat blanc à petits grains), harslevelu.
De la Pourriture noble comme art de vivre.
Le Furmint est robuste comme un Fürst des pays froids. Il résiste à presque toutes les maladies. Et si par hasard météorologique, il est attaqué de pourriture, il lui donnera sa plus grande noblesse. Pour bien le servir : une bonne exposition sud, un sol volcanique ou de loess.
Complètement Tokay celui-là...
Parmi ses nombreuses conquêtes, parmi les plus célèbres, vous connaîtrez forcément : Tokay, Tokay Aszù, Tokay eszencia en Hongrie.
En Provence, au sud d’Aix dans l’appellation Palette AOP.
Le goût de surprendre.
Quoi dîner avec ses blancs parfumés ?
Servez plutôt des produits de la mer, comme par exemple un pot-au-feu de la mer, une cassolette de langoustines, une dorade ou des sardines à la provençale l’été, des spaghettis vongole pour un blanc sec.
Avec un Furmint liquoreux : dépendant de la sucrosité du vin, vous pouvez oser pour le fromage avec un bleu, ou en dessert avec par exemple un soufflé aux coings, une tarte aux noix ou une tarte tatin de Sologne. Bien sûr, il est toujours possible d’ouvrir une bouteille pour un verre plaisir, avec quelques fruits secs à grignoter.
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