Histoire d'une passion entre Stan et la Bourgogne
Depuis fin 2018 nous avons beaucoup parlé de régions du monde entier, de cépages, de vignerons de renom, de grande qualité, etc… Mais j’avais à peine, vaguement touché du doigt les vins de la plus prestigieuse région viticole du monde. Drôle d’histoire pour moi avec La Bourgogne. En effet région une des plus réputées, et dont on s’arrache les vins depuis fort longtemps… Mais que mon profil estudiantin et de jeune professionnel de la vigne m’avait fait naturellement bouder, enfin naturellement, surement par inculture, manque de connaissance et grande outrecuidance de ma part.
Bizarrement en 2007 l’histoire me rattrape, un peu avant la grande folie, et le big bang autour de ce vignoble. En effet je me retrouve en contact avec plein de vignerons et autres professionnels de cette région et me voilà fichu à vie… et oui le Pinot me rattrape et me dépasse, me voilà happé par la finesse, l’élégance et la race de ce grand cépage mené par de grands vignerons dans une région bénie des dieux du vin…
Tous les 2 ans une grand-messe à lieu, durant une semaine. On peut en s’inscrivant déguster tous les vins de toutes les appellations, il s’agit des grands jours de Bourgogne, et hop 2020… l’année du VIN et bien patatras, voilà le Covid19, ce fichu Corona, au nom de bière qui vient tout fiche en l’air !
Annulation, etc… qu’à cela ne tienne, plus fort que les autres allez hop, on attaque, on y va… allons déguster quand même… Bon et bien non, tout le monde à la maison, alors puisque c’est comme ça parlons de cette région, sans déguster !
Les Chiffres
C’est un vignoble, mais également une appellation. 6 régions le composent.
Le vignoble de Bourgogne en région Bourgogne-Franche-Comté couvre les départements de l'Yonne, de la Côte-d'Or et de Saône-et-Loire. Il s’étend sur 250 km de longueur du nord de Chablis au sud du Mâconnais. Il comprend 84 appellations d'origine contrôlées (AOC) : six appellations « régionales », 45 appellations communales ou « villages » (avec 562 dénominations « premiers crus » sur ces appellations « village ») et 33 appellations « grands crus »
Les climats, ou appellations/terroirs puisque c’est ainsi qu’on les appelle ici, sont inscrits sur la liste du Patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2015. La vigne s’étend sur 29 500 hectares, dont 25 000 hectares en AOC. La production de cette région viticole s'élève à 1 500 000 hectolitres de vin, pour environ 200 000 000 de bouteilles commercialisées.
Les zones ou régions sont donc, et là attention, car 2 d’entre elles sont classées en Bourgogne par L’INAO alors que rien ne les laisse en Bourgogne autrement… et oui, loi et style ne sont pas la même chose, bref…
Le Chablisien, au nord, les 2 cotes ou la Grande Cote, Nuits, et Beaune, Le Chalonnais, le Mâconnais, et donc le Beaujolais et les Coteaux du Lyonnais, et oui les 2 derniers n’ont pas du tout la même unité mais ils en font partie… c’est ainsi.
Dominé par le Pinot Noir et le Chardonnay, La Bourgogne produit des vins rouges, à base des cépages pinot noir et gamay, et des vins blancs, à bases de cépages chardonnay et aligoté. Il est produit plus de vins blancs que de vins rouges, soit 60,5 % de vins blancs, 31,5 % de vins rouges et rosés et 8 % de crémant. On utilise également un peu de Pinot Blanc, de Pinot Beurrot et d’auxerrois, en quantité très minime toutefois.
La grande caractéristique de la Bourgogne est une mosaïque de sols ayant pour base l’argile et surtout le calcaire. Nous y reviendrons en parlant des grandes appellations de Chablis ou de la Côte de Beaune par exemple, mais ce calcaire, ce cailloux banc est en quelque sorte l’âme de ce pays.
Ensuite viennent les expositions et un climat ou certains cépages se sont parfaitement adaptés, climat semi continental tempéré, chaud l’été avec de fortes variations diurne/nocturne, humide l’automne et l’hiver. L’alignement des Côtes par exemple est assez « parfait » pour l’obtention de grands vins. On a d’abord utilisé les plaines, ou poussent aujourd’hui les céréales ou autres légumineuse, puis les moines, les fameux moines du moyen âge, qui ont structuré la viticulture européenne, Allemagne, France, Italie,…
On a donc ici des expositions la plupart du temps grâce à l’érosion au levant, et au sud, avec des pentes modérées et des failles ou des cuesta. Sans trop détailler la partie faille correspond à la fin du Massif Central, et les granits du Beaujolais, et les plateaux calcaires de la Grande Cote, quasi alignés avec le Mâconnais et la côte chalonnaise, entre.
La Cuesta correspond, elle à la fin de la Cote des bar et le sud de la Champagne, en extension du bassin de Paris, Chablis et Pouilly Fuissé en font partie. Ici les marnes calcaires sont bien plus présentes, et des sols plus lourds et plus crayeux apparaissent, un peu comme dans le Piémont.
Les Moines et les Ducs
Partout ils ont poussé le travail en créant des clos, des cloitres et en remontant les vignes sur les coteaux ou les terres étaient plus pauvres et plus difficiles, mais ou le vin devenait à chaque fois meilleur. Cisterciens de Citeaux, Clunisiens, De Beze, etc...
La classification actuelle des crus leur doit énormément, et la plupart des grands terroirs apparaissent à ce moment. Certains comme à Givry disparaissant pour renaitre plus forts aujourd’hui. Prisés par la Cour d’Avignon, cité papale de l’époque, les vins prennent alors un essor qu’ils ne perdront plus.
Les ducs de Bourgogne finissant le travail en rehaussant encore le niveau en édictant des règles strictes, qui font grandement penser aux décrets d’appellation de l’INAO actuels… Notons qu’en 1422 les vendanges eurent lieu en Août, donc fort précoces, et que les ducs de Bourgogne bien que loin de Dijon tirèrent grand profit « du meilleur vin de la chrétienté »
La qualité déclina quelque peu jusqu’à la révolution, le clergé n’étant plus aussi fort ni aussi scrupuleux. Vint le temps des nobles comme le Prince de Conti, puis la révolution. Napoléon avait dit-on un faible pour le vin de Chambertin…
La suite, phylloxera et INAO
Malgré une fin de 19e siècle compliquée à cause du phylloxera, et un début 20e qui le fut également à cause du mildiou le vignoble tint. A la fin des années 30 il verra donc l’INAO et les appellations émerger, et ce en partie grâce à de célèbres bourguignons, Henri Gouges, et Pierre Le Roy de Boiseaumariée.
De nos jours
Après des hauts et des bas, des millésimes difficiles dans les années 70, des rendements et un travail parfois trop léger les vins avaient perdu de leur éclat face aux concurrents notamment bordelais. Depuis les années 90 nombre de vignerons ont repris le chemin de la qualité et les acheteurs ont suivi. Le vin qui ne se vendait qu’en Europe, et beaucoup en France devint mondial. Les grands crus de Bourgogne dont la production ne représente qu’1,5 % du total est recherchée par tous les amateurs et les moins amateurs mais riches acheteurs… On a donc assisté depuis les années 2000, avec accélération sensible depuis 2005, à une flambée des vins les plus réputés et les moins accessibles dont l’exemple le plus frappant reste La Romanée Conti à Vosne Romanée.
On retrouve quelques coopératives notamment dans les zones à forte proportion de blanc du Mâconnais et de Chablis, où les tarifs sont doux et la qualité de vins assez élevée. Pour atteindre l’extase ou comprendre les plus hautes expressions de ce que peuvent donner le Chardonnay et le Pinot en revanche, il faut casser la tirelire. Mais n’oubliez pas qu’un Bourgogne régional d’un grand vigneron ou son village valent parfois bien mieux qu’un grand cru de n’importe qui …
La Bourgogne aura signé pour moi un moment crucial dans ma carrière, un tournant entre la production et la vente. Elle m’a mis le pied à l’étrier pour comprendre et m’ouvrir à un autre style de vin. Elle est mon entrée dans l’âge adulte, ma prise de conscience, une espèce de crise de maturité qui m’aura permis de m’ouvrir à une large palette de vins que je ne soupçonnais que très peu !
