Cuivre à 4kg/ha, comment faire avec ?
Lors du salon Millésime bio qui s'est tenu du 28 au 30 janvier 2019 à Montpellier, j'ai assisté à plusieurs conférences au cours desquelles le sujet du cuivre a été très présent. Toutes les intervenantes et tous les intervenants partagent une certitude : à l'heure actuelle il n'est pas possible de se passer du cuivre. Ils partagent une autre conviction : la suppression de la possibilité de lisser l'utilisation du cuivre sur 7 ans serait un frein important à la conversion bio et provoquerait même la sortie de certains.
Sur la région Languedoc-Roussillon la quantité moyenne de cuivre utilisée en 2018 (année de forte pression) a été de 4.2 kg/ha contre 2.4 kg/ha en 2017, répartie en 9 applications contre 6 l'année précédente. Les pertes ont malgré tout été, en moyenne, de 25 % en 18 contre à peine 7% en 17.
Pour rappel le cuivre est apparu dans les années 1880 en viticulture. Entre 1920 et 1960 la quantité moyenne de cuivre utilisée était de 50kg/ha/an !
Dans sa thèse Laetitia Anatole-Monnier (http://www.theses.fr/2014BORD0378 ) analyse précisément l'origine du cuivre stocké dans les sols. 34% proviennent des traitements phytosanitaires.
Reste à optimiser l'utilisation de celui-ci à faible dose.
Pour rappel, en bio, il n'existe à priori pas de solutions curatives (si vous en connaissez nous sommes preneur de votre expérience). Il faut donc travailler en préventif. Les acteurs en présence s'accordent sur un fait : il faut ANTICIPER.
- · En limitant la sensibilité de la vigne aux attaques
- · En surveillant la météo et en échangeant
- · En organisant le travail : avoir les hommes et le matériel disponibles au bon moment
- · Les risques de contamination
- · En mettant le bon produit au bon endroit et au bon moment.
Comment limiter la sensibilité de la vigne aux attaques ?
Il y a plusieurs pistes en la matière.
- L'une d'elle est de travailler en amont à l'obtention de plans résistants. Il s'agit d'un travail de sélection et de plantation de longue haleine. Ce travail de sélection vise à renforcer les résistances quantitatives et qualitatives de la vigne.
- Une autre vise à renforcer les défenses de la vigne grâce à des SDP (Simulateur de Défense de la Plante). Des matières actives telles que Cerevisane ou COS-OGA sont agrées en bio. Associées au cuivre ou au souffre elles ont un effet certain.
- Des éliciteurs (molécules produites par un agent phytopathogène ou un ravageur, qui induit chez une plante la production de phytoalexines et par extension, une molécule qui déclenche les mécanismes de défense des plantes avec production de substances défensives). Nous pouvons citer le CHITOSANE, les extraits de levure ou de pénicillum, les chitooligosaccarides et l'acide oligalactimonique.
Comment renforcer l'action du cuivre ?
Il est possible d'atteindre cet objectif de différentes façons.
La première passe par l'association d'autres substances au Cuivre. Le groupe de 11 experts, aux compétences complémentaires, regroupés au sein de ESCO (piloté par l'INRA) inventorie 8 solutions prometteuses. 1 est une huile essentielle (l'huile essentielle d'orange douce), 6 sont des extraits végétaux : les terpines (hydrocarbures issus de plantes, notamment des conifères), les décoctions de prêle, la tisane d'ortie, l'extrait d'écorce de Saule (salix spp) et les lécithines (pas de soja OGM 😉 ). L'huile essentielle de thym est également intéressante ainsi que les extraits de Sauge officinale (salvia officinalis), réglisse (Glycyrrhiza glabra), d'ail, de Yucca et de Margousier. La dernière des 8 solutions s'appuie sur les métabolites microbiens (fermentations) au travers des lipopeptides bactériens (association d'acides aminés et de lipides). (Lien vers article d'agroperspectives).
Une autre façon est d'optimiser les phases de traitement. Le mildiou pénètre par les stomates. De ce fait une bonne pulvérisation est une pulvérisation qui atteint également les faces inférieures des feuilles. Le choix du pulvérisateur (une certification est en projet) et son entretien sont donc des éléments clés de la lutte ! Un matériel propre et bien réglé (notamment les buses, par exemple) sera un atout certain dans l'optimisation de l'utilisation du cuivre. Selon des études une pulvérisation tous les 2 rangs est la plus efficace. Je trouve intéressant d'utiliser des panneaux récupérateurs qui permettent de récupérer 40% de la solution ! Le traitement face par face diminue quant à lui le volume d'eau utilisé par 2. Des vignerons bios m'ont indiqué utiliser des solutions permettant d'améliorer la fixation du cuivre (qui est et reste un produit de contact) sur les feuilles. Il s'agit notamment du savon noir.
Des pratiques culturales peuvent également avoir une influence.
En arboriculture bio , le broyage ou l'enfouissement des résidus infectés (feuilles par exemple) sont régulièrement utilisés et ont démontrés leur efficacité. Ce n'est pas ou peu le cas en viticulture… Il semblerait que l'avoine cultivé en inter rangs permettent d'absorber une partie du cuivre.
La combinaison de ces différents éléments est à même de rendre possible la limitation à 4kg de cuivre /ha/an sous réserve que le lissage sur 7 ans soit maintenu. Pourquoi ne pas rêver qu'un jour elles permettent de se passer totalement du cuivre ? A moins que ce ne soit déjà possible… mais cela fera l'objet d'un prochain article et pour rédiger ces derniers nous avons besoin de vos retours d'expérience que vous pouvez envoyer à : contact@winameety.com