Stan nous parle de ses émotions en matière de vin
Une bouteille un jour sûrement m’a déclenché une épiphanie. Sûrement car comment expliquer cette envie folle et incontrôlable de goûter, incessamment puis continuellement des vins, connus ou non, déjà dégustés ou non ? De s’organiser en fonction de là ou sont les vignobles, les vignerons ? Comment expliquer ce besoin viscéral de savoir, de comprendre pourquoi ces gouts ? et surtout pourquoi cette fichue émotion ? Pourquoi ce moment figé et tellement présent dans la mémoire ?
En 2018 le Monvigliero 2010 du domaine Burlotto à Verduno est peut-être un des meilleurs vins si ce n’est la plus belle émotion de l’année pour moi... Encore un Barolo, et de loin devant tous les Bourgogne et autres grands vins dégustés dans l’année.
Non loin le suivait toujours en termes d’émotion un vin de Mont Olivet...
Ah les émotions ! Plus que le goût ou les étiquettes, c’est elles qui rendent fou un amateur de vin, retrouver cette sensation à jamais perdue de la première émotion procurée par un vin coup de cœur. Une impermanence, une fugacité après laquelle on court comme une quête éperdue du bonheur... Ces souvenirs il y en a quelques-uns liés à l’endroit, au moment, au vin lui-même...
Le temps suspendu, la cristallisation de l’écrivain, quelques vins me viennent à l’esprit, John Riddoch 1990, Emmanuel Rouget Echezeaux, Moulinier Terrasses Grillées, Alain Chabanon, Rostaing Ampodium 2005, Gonon 2016, Stella di Campalto Brunello 2009, Lagrein Riserva Pfitscher, Giaconda Chardonnay 2006, Cascina Francia 1994, Clos d’un Jour, et Monvigliero 2010, ... pas de Bordeaux, peu de Bourgogne, juste quelques moments suspendus, des claques instantanées, si puissantes que plus rien ne compte que cet instant, transporté, hors du temps.
La liste des vins marquants est sûrement bien plus longue, mais la seule recherche dans les souvenirs démontre une autre démarche que la fulgurance dont je parle ici, celle qui vous a donné une irrépressible envie d’en savoir plus. Imaginez un parfum qui vous rend fou, vous a entêté, une mélodie tellement accrocheuse, qu’alors il vous faut retrouver la personne qui le portait, tout savoir sur l’auteur ou les interprètes du morceau...
La quête commence, la passion n’a pas de borne, elle rend beau, elle rend stupide, borné, mono-maniaque, dangereux pour soi et les autres. Belle et contagieuse, en même temps, car portée par un élan si fort en soi. On embarque parfois les autres dans nos sillons, tel un messie éberlué.
Voilà ce que la passion du vin me fait faire et devenir !
Un gourou du goût, un acharné du grain de tannin, un démon de la puissance contenue, de l’élégance minérale... Une vie sacrifiée sur l’autel de cette émotion à jamais disparue de la première fois, et pourtant si renouvelable.
C’est sûrement cette recherche de la prochaine première fois qui nous guide si aveuglement vers d’autres horizons et d’autres vins, retrouver cette émotion, cette sensation qui suspend le temps en un ballet de saveurs, de finesse et de goûts si uniques et longs...
Rien que le fait de l’écrire remonte les souvenirs, l’esprit se tend, il s’arc boute, il se déforme et se met en mode furet, ou, quand, quoi, partir, chiner, repérer, re goûter, réessayer... la prochaine grande émotion, sera-ce une rencontre avec un endroit, avec une femme, avec un homme... chaque année son lot de géniaux vins, ou géniaux faiseurs de vins...
Où la prochaine va-t'elle me mener ? Un blanc, un rouge, cépage inconnu, grand classique, France, étranger, lointain ou proche...
Quand cela s’arrêtera-t-il ? Jamais ? Épuisant un peu non ?
Mais à chaque fois que la lassitude ou l’ennui pourrait se manifester un diable de vin apparaît, une émotion parfois légère, parfois incontrôlable ressurgit et le gourou lui aussi et avec son bâton tel un pèlerin il part délivrer la bonne parole.
Impossible de se départir de ça, alors peut être me suivrez-vous, à la recherche des vapeurs enivrantes des première fois, multiples et protéiformes, aucune n’est semblable, seule la force de l’émotion et du souvenir reste, et un nom, une forme, même le goût est parti, en revanche l’émotion, elle, survit.
Saloperie d’émotion ... !