Voilà un domaine qui mérite un coup de projecteur : L'Espigouette
Peu médiatisé, et pourtant il mériterait de l’être un peu plus, voici un domaine qui jongle entre sa tradition séculière, son style rustique et des racines ancrées profondément dans le paysage local. Un besoin de moderniser son style, puis de travailler plus sainement et plus dans l’air du temps des vins et des terroirs variés. Le domaine de l’Espigouette produit des vins sur les appellations sudistes de Gigondas, Vacqueyras, Plan de Dieu, Rasteau et Côtes du Rhône, un bel éventail des terroirs du Sud Drôme, et Nord Vaucluse.
Le domaine est aujourd’hui travaillé par les enfants de Bernard Latour, Émilien et Julien. Ils exploitent une vingtaine d’hectares, avec un très logique encépagement marqué par le Grenache, autour de 80 %.
Les travaux à la vigne sont limités au travail du sol, pas de désherbant, passages de souffre et cuivre, lorsque nécessaire, travaux en vert. La vendange est mécanique, avec du matériel récent et efficace, de manière à trier au maximum, et donner des résultats optimums. Le caractère des sols se retrouvera ensuite dans les cuvées ainsi que les expositions.
Tous ceux qui ont traversé le plan de dieu savent de quoi je parle, cet océan de vignes, solaire et caillouteux, galets roulés et alluvions, donne souvent des vins trop murs et caramélisés, il faut donc bien gérer le stress hydrique et les coups de soleil.
Principalement calcaires, les sols varient selon les crus, bien évidemment, car ici se mêlent sables ou saffres, dépôts alluvionnaires, marnes calcaires, galets roulés, éboulis de cailloutis calcaires, donc très diversifiés. Les rendements au domaine sont faibles, utilisation de vieilles vignes et le climat sec et chaud ne favorisant pas les quantités.
De ce fait les vins sont assez concentrés mais pas confiturés, et heureusement.
Je déguste donc la gamme complète. Je commence par un blanc issu de Grenache, Marsanne et Viognier. On sent bien le Viognier sa faible présence à hauteur de 15 % qui donne des arômes d’abricot au milieu des notes miellées et tilleul conférées par le grenache. La bouche est ronde et gourmande, facile pêche et abricot, fruits de saison et locaux. Bien
Des 2 Côtes du Rhône, Latour de Bel Air est un peu plus léger et friand que le VV, un vin simple et immédiat, fruité explosif nez aromatique légèrement réglissé, tendu et gourmand on le mettra au frais, alors que le VV est un vin plus dense, mais sans lourdeur, une jolie longueur, des arômes discrets, sauvages, d’épices, avec une bouche grasse et tendue, Bien
Le plan de Dieu est typé, des fruits noirs, un peu de bonne volatile fraîche, bouteille ouverte... mais un très joli jus en bouche doux et gras, Bien
Le Vacqueyras 2016 et son dense, d’olive noire, de tapenade, aux arômes de noisette et de grillé est enivrant, sa bouche juteuse, fraîche, tendrement sudiste en fait un vin à ne pas manquer, Bien+/++
Rasteau 2016, il possède volume et gras, plus riche et plus massif que le précédent, il faudra l’attendre ou pour amateurs de puissance.
Deux Gigondas, le 1921, au nez discret et légèrement fumé/boisé est bon, pas lourd et plein de fraicheur, le VV de 2016 quant à lui, possède une rusticité authentique, viandé, sang séché puis fruits noirs, c’est massif puis étonnamment léger et frais en bouche, juteux, rond, avec une belle acidité... Bien +/++
Malgré de terribles chaleurs les vins se dégustaient assez bien, et la patte du domaine s’affirme de plus en plus. Je pense qu’avec le domaine du Terme, nous entendrons parler de ces 2 vignerons dans les années à venir. La finesse qui caractérise le Vacqueyras, vrai coup de cœur, puis un Gigondas à la fois rustique et frais, sans oublier des Côtes du Rhône au très bon rapport qualité prix, en font un domaine de bientôt premier plan...
En outre la région regorge de domaines de ce calibre qui font des vins de grande qualité et aux tarifs encore doux, l’amateur aurait tort de s’en priver.