Rémy Bousquet croque le vin à pleines mains

Au fil des rencontres

publié le lundi 21 mai 2018 à 08h00

Rémy Bousquet croque le vin à pleines mains

Vous avez sûrement déjà croisé les incontournables dessins humoristiques sur le vin signés Rémy. On a justement cherché à savoir qui se cachait derrière ce trait de crayon un brin caricatural et bourré d'humilité.

Qui est donc Rémy Bousquet ? Il est né à Montauban, (à l'accent, on ne s'y trompe pas) et a toujours plus ou moins baigné dans le monde du vin puisque son grand-père était agriculteur et viticulteur et son père était laborantin à la Chambre d'Agriculture du Tarn-et-Garonne. Enfant de la campagne, le contexte était déjà bien établi pour lui donner le goût du terroir, des produits du jardin, le plus souvent bio, et des précieux échantillons de vin sur la table.

A ses heures perdues, il prend rapidement le goût au dessin. Autodidacte, il tire ses inspirations des journaux et bandes dessinées de son père sans savoir encore qu'ils auront un impact décisif sur sa future carrière. En compagnie de Charlie Hebdo, Hara Kiri, L'Echo des Savanes, Rémy se forge un esprit critique qu'il met à profit pour établir son fameux coup de crayon et ses indissociables jeux de mots. C'est d'ailleurs André Franquin (Spirou et Fantasio, Gaston Lagaffe...) qui lui donne l'envie de dessiner et qui l'inspire dans sa démarche artistique. Il détourne tout ce qui l'entoure dans ses dessins, bien avant de croquer le vin et qu'il ne devienne par la suite son sujet de prédilection.

Bac littéraire en poche, Rémy fait le choix de ne pas continuer ses études et part effectuer son service militaire pendant deux ans à Clermont-Ferrand. Puis il trouve un travail sur La Rochelle en tant que vendeur et responsable d'un magasin de téléphonie mobile. Au bout de quatre ans, Rémy a de nouveau la bougeotte et rejoint sa soeur sur Nice où il travaille en tant que magasinier pour le groupe Metro. Deux ans plus tard, la fratrie rentre à Montauban mais le regard que porte Rémy sur sa campagne est tout nouveau, lui qui avait tant cherché à la fuir pour découvrir la vie citadine, il se rend finalement compte qu'elle a beaucoup à lui offrir.

"J'étais tellement inspiré que j'ai continué sans m'arrêter"

Le retour au bercail devient sa source d'inspiration pour ses dessins qui ne l'ont jamais quittés. C'est désormais la ville qu'il caricature et dont il se moque gentiment en mettant en lumière les richesses de la campagne. Il se prépare un petit atelier, achète du papier, de l'encre de chine et du blanco, avide de travailler le noir et blanc. Il crée alors une quarantaine de dessins pour constituer une petite exposition "Ca bouchonne à Paris, ça débouchonne chez nous" qui deviendra par la suite sa marque de fabrique et son identité d'artiste. Chaque dessin est toujours accompagné d'un slogan, d'une image, pour que le message détonne tout en restant accessible et facile à comprendre. "J'étais tellement inspiré que j'ai continué à dessiner sans m'arrêter, jusqu'à ce que les idées se tarissent et que la spontanéité ne soit plus au rendez-vous", explique-t-il.

Pas question de réguler son trait, ni de passer par le crayon à papier, tout était directement jeté sur le papier tel quel, à l'état brut et sans regret. Il décide donc de lancer son exposition et s'entoure de producteurs locaux (dont des vignerons) pour rester dans le thème de la campagne. L'événement fait bonne presse et tous ses dessins partent comme des petits pains. Si le concept plaît aux gens, par sa façon de détourner les codes du marketing tels qu'on les connaît aujourd'hui, pourquoi ne pas continuer dans cette voie ? Son objectif : promouvoir des choses utiles tout en restant simple et en faisant un pied de nez aux publicités télévisuelles qui en mettent plein la vue. Pourtant il se revendique comme un enfant de la télé et fier public des Nuls et des Inconnus qui ont, par un humour décalé, marqué sensiblement leur époque et bien entendu notre artiste.

Rapidement, son nom commence à circuler dans le milieu du vin. Après son expérience du commerce, il se dit qu'il est temps de valoriser les choses et d'envisager une solution à long terme. Il réfléchit donc à d'autres alternatives et commence à décliner ses dessins en carte postales, affiches, tabliers, tee-shirts afin de rentabiliser ses premières sorties et surtout de se faire un nom !

On est en 2008 et Rémy découvre les subtilités des réseaux sociaux et des blogs, la tendance du moment. Au fil des rencontres et des échanges, l'artiste se rend compte que le vin à tant à lui apprendre qu'il aborde d'un oeil professionnel l'univers Facebook. Il l'utilise comme une vitrine de ses créations et bâtit une communauté exclusivement issue du vin. Il fait partie des pionniers à dévoiler une communication décalée sur le vin, ce qui est illégal pour une agence de communication. Mais Rémy ne revendique pas de marque, ni la vente de vin, donc la finalité n'est pas la même, mais grâce à son réseau, de grands noms du vin et de la presse se sont rencontrés par son intermédiaire. Il met donc sa communauté à contribution et s'entoure d'influenceurs du secteur, tous métiers confondus (blogueur, journaliste, sommelier, caviste, vigneron...) en leur proposant de se prendre en photo avec un tablier de sa création qu'il leur fait parvenir à ses frais. Quinze jours plus tard, tous ont joué le jeu et il réunit tous les clichés sous forme d'affiche où apparaît le pêle-même de polaroids. Une fois postée sur les réseaux sociaux, la communication a opéré toute seule et la machine est lancée!

"Tant qu'il y a de la vigne, y'a de l'espoir"

Sa marque "Ca bouchonne à Paris et ça débouchonne chez nous" est créée la même année et par la suite un nouveau coup de com' deviendra son n°1 des ventes de tee-shirts. "Mais l'anecdote est plutôt marrante puisque le coup de pub est parti d'un délire, à l'époque j'avais fait un tee-shirt sur photoshop avec le slogan "Tant qu'il y a de la vigne, y'a de l'espoir" et j'ai posté le tout sur mon mur en indiquant qu'il s'agissait d'une nouvelle création et que 'si intéressé, me laisser un message', mais le tee-shirt n'existait même pas, c'était un délire et les gens ont pourtant marché, en une heure j'avais déjà une cinquantaine de commandes !" raconte-t-il.

Mais il reconnaît que Facebook a aujourd'hui bien changé et que le réseau ne permet plus la même visibilité qu'avant. Il s'est placé sur ce créneau au bon moment, et ce sont les professionnels qui le sollicitent désormais. "Au départ, on était tous sur un même pied d'égalité, petit ou gros, aujourd'hui, ce n'est plus du tout la même chose, les enjeux ne sont plus les mêmes pour la plateforme. Le boost payant est davantage mis en avant et les algorithmes ont complètement changé en terme de portée," explique-t-il.

Si sa communication est enfin bien rôdée, ce qui lui manque est de pouvoir participer à un important salon du vin. Son souhait est rapidement exaucé puisqu'il se fait contacter par Vinisud pour exposer sur leur salon de Montpellier en tant qu'artiste invité en 2010. Puis le rendez-vous est renouvelé à chaque édition, l'occasion pour Rémy d'être vu, reconnu et de pouvoir lui aussi retrouver les domaines et vignerons avec qui il souhaite travailler ou être en partenariat.

Mais si les projets ne se tarissent pas, Rémy continue à être ébahi par ses premiers contacts importants, Vinisud d'un côté et le syndicat de l'appellation Châteauneuf-du-Pape de l'autre. Avec beaucoup d'humilité, il avoue effectivement être toujours aussi surpris par cette reconnaissance. "Autant les gens autour de moi me disent que c'est super, autant je suis toujours aussi surpris. Je reste très critique envers moi-même et je ne suis jamais totalement convaincu de ce qui peut arriver ou non, ni de comment ça va se passer. En même temps, je me dis que si j'en suis là aujourd'hui, c'est peut-être bien qu'il y a quelque chose, et que je dois me rassurer mais on ne sait jamais si les gens vont accrocher ou non à un dessin, ce n'est jamais acquis."

Désormais, il travaille auprès de boîtes de communication spécialisées dans le vin, de syndicats de vignerons et de salons et il travaille sur des produits types avec des slogans créés spécialement pour eux et à leur image. Il réalise son rêve de toujours : faire de la communication et de la publicité totalement personnalisée. Des établissements étoilés font également appel à lui pour leur carte de voeux en vue de la nouvelle année par exemple. A l'heure, où nous échangeons avec lui, il planche sur plusieurs projets : une étiquette pour un cru des Côtes du Rhône, le visuel d'un tee-shirt pour un événement sur le rosé qui se déroulera cet été, un visuel pour une association vigneronne ainsi que deux expositions, la première qui est en cours au Château Mangot à Saint-Emilion et la seconde qui se passera au sein de la boutique du caviste Vinothentik à Chabeuil. On ne s'en lasse pas !

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